Interview de Anthony, 2 enfants en unschooling. Apolline 11 ans et Léon 9 ans sont déscolarisés depuis 3 ans. Apolline fréquente l’école jusqu’à l’âge de 8 ans, et son frère Léon suit les 3 années de maternelle.
Quelles raisons vous ont amenées à déscolariser vos enfants ?
Depuis qu’ils sont parents, Anthony et son épouse se renseignent sur les différents modèles éducatifs. Privilégiant l’aspect pratique, ils scolarisent leurs enfants dans l’école de leur quartier, qui propose une pédagogie classique. Bien qu’une école de type Montessori/Freinet, qui correspond plus à leurs aspirations, soit à 30 minutes de leur domicile, ils trouvent une meilleure qualité de vie dans la première option. Poursuivant leur réflexion, ils découvrent que ce n’est pas l’école qui est obligatoire, mais l’instruction… Le déclic viendra lors du visionnage du film Etre et devenir de Clara Bellar, recommandé par la belle sœur de Anthony, institutrice ! Ils réfléchissent encore et discutent avec leurs enfants. Ils ont à cœur de leur offrir une possibilité différente de vivre leur enfance, sans leur imposer leurs choix. Chaque année, la question est posée de savoir s’ils souhaitent poursuivre leur Instruction En Famille, ou retourner à l’école.
Pourquoi le unschooling plutôt que le formel ?
Anthony précise qu’ils ne se situent pas à l’extrême du unschooling. Anthony et son épouse choisissent ce mode d’instruction informelle car ils ne souhaitent pas adopter une posture se rapprochant de celle d’un enseignant. Anthony fait allusion a un témoignage malheureux entendu : la confusion des rôles instituteur/parent dans une instruction formelle créait des tensions au sein de la famille. Ils ne font donc pas classe, n’ont pas de moment programmé pour étudier telle ou telle matière. De plus, Anthony est très fortement convaincu que les enfants apprennent lorsqu’ils sont demandeurs.
Quels sont vos supports d’apprentissage ?
La famille est très minimaliste en ouvrages pédagogiques prévus pour suivre le programme scolaire. Il s’agit plutôt de supports variés, d’un joyeux mélange de vie quotidienne, de visites (musées…), de sites internet. Par exemple, pour étudier l’orthographe et la grammaire, ils suivent les consignes données sur internet pour fabriquer du matériel Montessori. Les parents sont tous 2 de grands lecteurs. Leur goût pour la lecture est transmis naturellement à leurs enfants, qui ont accès à tous les ouvrages. Anthony et son épouse étant très présents, ils constituent des ressources pour leurs enfants. Ils leur donnent la possibilité d’explorer un peu plus ce qui les intéresse, enrichissent sur mesure leurs apprentissages et découvertes.
Comment réagit votre entourage ?
« A ma grande surprise, les réactions sont positives ! ». Anthony s’attendait à une opposition de la part de sa famille. Seule une tante a eu une réaction négative que Anthony met sur le compte d’une différence générationnelle. Leur famille, ouverte et instruite, réagit sous forme de questionnements constructifs, qui se transforment au fil du temps en soutien. Ce positionnement de leur entourage est aussi dû à la façon dont Anthony et son épouse ont présenté les choses : ils ne dénigrent pas l’école, ni les parents qui font d’autres choix, et ne parlent pas de l’Instruction En Famille comme étant la solution idéale. Leurs amis : « C’est super, mais moi je n’y arriverais jamais ! ». S’ils sont d’accord sur les bénéfices pour les enfants, ils se demandent comment ce choix peut être gérable pour les parents. L’ancienne équipe d’enseignants les soutient aussi ! Ils comprennent qu’il ne s’agit pas d’un rejet de l’école.
Apolline et Léon participent-ils à des activités extérieures à la famille ?
Les parents cherchent à proposer à leurs enfants un mélange harmonieux d’activités sportives, artistiques et intellectuelles. Apolline pratique l’escalade, joue du piano et dessine aux beaux arts. Léon pratique la gym, joue de l’accordéon et chante dans une chorale. Tous 2 sont scouts. Ces activités rythment la semaine et rappellent l’obligation d’horaires à respecter, ce qui est intéressant dans un cadre unschooling. En plus de ces activités, la famille habitant un quartier verdoyant, les enfants se retrouvent souvent à l’extérieur avec leurs amis/voisins.
Comment conciliez-vous vie professionnelle et unschooling ?
Anthony et son épouse étant indépendants, leurs horaires sont relativement flexibles. Ils s’organisent pour être disponibles pour leur enfants, chacun une partie de la semaine. Anthony, thérapeute, se libère du lundi au jeudi et prend ses rendez-vous professionnel en soirée et fin de semaine. Son épouse travaille dans un bureau d’étude du lundi au jeudi en journée, elle est disponible pour ses enfants en soirée et fin de semaine.
Comment s’est passée l’inspection ?
En Belgique, il n’y a pas d’inspection annuelle à domicile. Les enfants passent des tests d’aptitudes tous les 2 ans. C’est l’occasion pour l’inspecteur de rencontrer parents et enfants et d’estimer si tout va bien. A 8 ans et 10 ans, les tests ne sont pas certifiants, il s’agit d’une évaluation. A 12, 14 et 16 ans, les certificats sont obligatoires et nationaux. Apolline et Léon réussissent les tests sans préparation, les compétences restant basiques. L’aspect le plus stressant réside dans le fait de ne pas savoir quel inspecteur va leur être attribué. Cependant la famille décide d’adopter une position collaborante, ce qui engendre un bon contact et des discussions intéressantes qui enrichissent leurs connaissances réciproques. Ils peuvent ainsi se rejoindre sur leur objectif commun : le bien-être des enfants et leur insertion dans la société.
Avez-vous des conseils pour des familles désirant se lancer dans l’aventure unschooling ?
- Etre conscient que le unschooling est rarement mauvais pour l’enfant
- Se rendre compte des implications pour les parents : Est-on prêt à diminuer son niveau de vie ? Bénéficie t-on d’un soutien social (famille, amis, voisins… ) ?
- Impliquer les enfants dans la décision
- Essayer ! On peut toujours faire machine arrière si ce mode d’instruction ne convient pas, et rescolariser les enfants.
- Une bonne connaissance de soi et de la dynamique familiale permettent de savoir si cette philosophie de vie peut convenir…
Un dernier mot pour évoquer votre unschooling ?
« Dans le système scolaire, il y a l’idée de préparer les enfants à entrer dans un modèle normatif conçu pour eux . Nous souhaitons leur donner confiance en eux et dans leurs choix. Ils peuvent essayer plein de choses, développer cette capacité et cette curiosité naturelles d’apprendre, en s’entraînant. Nous avons envie qu’ils gardent intact le goût de l’apprentissage et qu’ils trouvent eux mêmes leur modèle. »
Un grand merci à Anthony pour son témoignage qui pourra aiguiller des familles en recherche d’informations et de conseils. Pour compléter celui-ci, voici son blog qui contient de nombreux articles en lien avec le unschooling : anthonyvandeuren.com
Florence P, pour Pass éducation