Dans le cadre de l’école à la maison, la tentation de comparer ses enfants aux autres peut souvent survenir. Les conséquences sur le développement et le bien-être des jeunes apprenants peuvent être néfastes si l’on n’y prend pas garde. Cette comparaison, généralement estimée comme anodine, peut, en effet, avoir des répercussions : ychologiques profondes sur l’enfant. Elle peut affecter son estime de soi et sa motivation. Pourquoi éprouve-t-on le besoin de comparer ses enfants aux autres en IEF ? Quels sont les risques d’une telle comparaison et comment cultiver une approche plus saine et plus équilibrée dans l’éducation apportée aux enfants ?
Comprendre le besoin de comparaison
Qui n’a pas comparé ses enfants aux autres, que ce soit dans le cadre de l’instruction en famille ou de l’école traditionnelle d’ailleurs ? Parfois, c’est un peu plus fort que nous : on sait au fond de nous que cela n’a aucun intérêt de le faire, mais on compare quand même. Quoi de mieux que de comprendre ce phénomène et ses conséquences, pour essayer de le limiter. Le besoin de comparer ses enfants aux autres est souvent le fait de deux biais cognitifs majeurs : le biais de contraste et le biais de confirmation. Les biais cognitifs sont le fait de notre cerveau, qui essaie toujours de simplifier le traitement des informations reçues. Leurs origines sont diverses, mais l’influence sociale et culturelle est indéniable. La conséquence de ces biais, c’est qu’ils viennent affecter notre jugement et nos décisions. Un des plus connus est le biais de négativité qui fait que, si l’on n’en prend pas conscience, on aura tendance à voir ce qui a été échoué plutôt que ce qui est réussi.
Le biais de contraste intervient par exemple quand on observe les résultats de son enfant par rapport à ceux d’un autre enfant du même âge. On va alors faire fi de tout autre facteur pour ne s’arrêter que sur le résultat à l’instant T et en tirer des conclusions. Ce biais va intervenir pour se rassurer (ou pas…) sur le niveau de son enfant.
Entre aussi en jeu le biais de confirmation. En IEF, cela consistera par exemple à se conforter dans l’efficacité des méthodes pédagogiques employées : si notre enfant a de bons, voire de meilleurs résultats qu’un enfant scolarisé à l’école, alors c’est que nous faisons ce qu’il faut. A contrario, si ce n’est pas le cas, on peut en venir à douter et à chercher à appliquer la meilleure méthode. Mais en existe-t-il une meilleure qu’une autre ? La plus efficace n’est-elle pas celle qui répond le mieux aux besoins de notre enfant… celle qui développe ses compétences à son rythme, en prenant en compte sa singularité ?
Comparer ses enfants aux autres : quels sont les risques ?
La comparaison entre enfants, même lorsqu’elle est effectuée avec les meilleures intentions, peut être néfaste. Si avoir quelques repères concernant le développement de l’enfant me semble important, afin de pouvoir, si besoin, apporter des soins spécifiques, cela ne doit pas faire oublier que chaque enfant progresse à son rythme.
Quand la comparaison aux autres impacte l’estime de soi
Lorsque les enfants sont constamment mesurés à l’aune de leurs frères et sœurs ou de leurs pairs, ils peuvent développer une image négative d’eux-mêmes. Ils peuvent se percevoir comme inférieurs s’ils ne répondent pas aux attentes ou aux standards établis par leurs parents. Leur estime de soi s’affaiblit.
Il est rare qu’une mise en compétition, non choisie par l’enfant, réussisse à le motiver. Au contraire, une telle situation peut retarder son développement personnel. Par ricochet, ses apprentissages peuvent pâtir de son manque de confiance en lui.
Lorsqu’ils sont constamment mesurés à d’autres, les enfants peuvent se sentir moins compétents et moins confiants dans leurs propres capacités. Cela peut les conduire à une motivation réduite et une peur de l’échec.
Quand comparer ses enfants attise les conflits fraternels
La comparaison peut engendrer des disputes fraternelles et une compétitivité malsaine au sein de la fratrie. On ne prend pas toujours conscience de ces petites phrases que l’on sort devant les enfants : « sa sœur parlait déjà extrêmement bien au même âge », « son frère maîtrisait déjà les 4 opérations à cet âge-là », etc. Et pas besoin d’être en instruction en famille pour produire de telles maladresses. Attention, on reste des humains avec leurs biais cognitifs. Point de parents parfaits à l’horizon. L’idée, c’est d’en prendre conscience pour contrecarrer ces biais cognitifs !
Lorsque l’on fait l’école à la maison, de telles comparaisons peuvent générer une rivalité entre frères et sœurs pour obtenir l’attention et l’approbation des parents. L’environnement familial peut devenir tendu, compétitif et conflictuel.
Et puis, en IEF, les enfants peuvent basculer dans un système de comptage et comparer le temps passé par le parent instructeur avec chacun. L’adoption d’une posture qui valorise les progrès de chaque enfant sans comparaison à un autre, si ce n’est à lui-même finalement, joue un rôle clé lorsqu’on a plusieurs enfants en ief.
Quand la comparaison des résultats affecte la confiance du parent instructeur
Lorsqu’on choisit d’instruire en famille, on peut passer par des moments de doute. Le syndrome de l’imposteur n’est jamais loin et une petite voix peut nous souffler qu’on n’y parviendra pas. Faire l’école à la maison, c’est choisir des méthodes pédagogiques afin d’accompagner au mieux l’enfant vers les compétences du socle commun.
Le plus souvent, on a à cœur de suivre les intérêts de l’enfant pour répondre au mieux à ses besoins. Du coup, peut-être n’en sera-t-il pas au même niveau de connaissances que des camarades du même âge scolarisé : son niveau en lecture sera peut-être plus avancé, mais il n’aura pas encore vu certaines notions de géométrie.
Cela signifie-t-il pour autant qu’il faille tout remettre en cause au niveau des méthodes pédagogiques ? Et si la comparaison a lieu avec une autre famille en IEF, on peut vite se dire qu’il nous faut exactement le même matériel pour que notre enfant obtienne de bons résultats.
Or l’enfant a avant tout besoin d’un environnement et de méthodes stables et qui lui correspondent, plus que du dernier support, matériel ou de la nouvelle application disponible.
Dans un environnement d’instruction en famille, où l’éducation est censée être adaptée aux besoins individuels, les comparaisons avec les autres peuvent semer la confusion et la frustration chez le parent et chez l’enfant.
Comment éviter de comparer ses enfants aux autres ?
Que faire pour empêcher ces comparaisons non constructives et se concentrer plutôt sur les forces et les progrès individuels de chaque enfant ? Au quotidien, vous pouvez mettre en place :
- Des objectifs d’apprentissage personnalisés, qui correspondent aux capacités et aspirations de chaque enfant. On parle souvent d’objectifs SMART. C’est-à-dire qu’ils doivent être
- Spécifiques ;
- Mesurables ;
- Atteignables ;
- Réalistes ;
- Temporellement définis.
Découper l’objectif final en petits pas permet de célébrer chaque étape franchie. Cela renforce la confiance en soi et diminue la nécessité de comparaisons externes.
- Une évaluation individualisée, pas forcément chiffrée d’ailleurs. À l’école, l’enfant n’a guère le choix. Le système de notation est ainsi fait que même s’il ne le souhaite pas, les notes et le groupe sont là pour inviter à se comparer. En IEF, chaque enfant peut être évalué individuellement. Il voit ainsi ses talents uniques, ses intérêts, son rythme d’apprentissage, reconnus et valorisés en fonction de ses propres mérites et non par comparaison à ses frères et sœurs ou à ses pairs.
- Un environnement d’apprentissage positif, bienveillant, qui encourage
- la collaboration et le partage plutôt que la compétition ;
- le dialogue et l’expression de ses ressentis grâce à une relation parent-enfant basée sur la confiance et le respect mutuel.
La liberté offerte par l’instruction en famille en matière de méthodes d’apprentissage permet, lorsqu’on en a conscience, de s’éloigner de la mentalité de comparaison qui prévaut souvent dans les environnements plus traditionnels.
Elsa Boulet, du blog Mes Petits Curieux, pour Pass-education