Prendre la décision de suivre un mode d’instruction en famille, c’est se mettre en première ligne. Le gouvernement, les administrations, les commerçants, la famille, les proches, … – les jugements fusent. On peut rapidement se sentir très seul et isolé. Il en devient alors d’autant plus difficile de faire face à l’IEF en lui-même. On est vulnérable. Des sentiments d’inutilité, d’être dépassé, peuvent vite s’imposer, et décourager des parents qui se croyaient motivés à toute épreuve. Cela peut vite devenir un cercle infernal, avec tous les dangers que cela implique. On est vulnérable, mais nos enfants ont besoin de nous. Parfois (souvent ?), ils ont besoin de nous malheureusement au moment où nous sommes précisément le plus vulnérables. Il convient, malgré notre indisponibilité du moment, d’être vigilant(e), car c’est alors que les réservoirs d’affection se vident, que les besoins ne sont plus assouvis, de part et d’autre. Il est impératif de réagir, pour ne pas laisser frustration, tristesse, colère et ressenti, s’installer.
Comment faire ?
Saisissez toute opportunité d’avoir avec votre enfant des discussions à cœur ouvert, sans tabou, ni jugement. Il faut impérativement être honnête avec vous-même, sans nier vos besoins, vos envies (être honnête avec soi-même est la première étape pour être honnête avec les autres, aussi petits fussent-ils). Il faut vous accepter tel(le) que vous êtes, avec les défauts qui sont les vôtres. Ne faites surtout pas une fixation, un blocage, dessus, mais au contraire essayez, d’une manière ou d’une autre, d’en tirer parti. Tout le monde a des failles, cela ne fait pas de vous un mauvais parent. Cependant, il est impératif d’avoir cette honnêteté et de parler à votre enfant avec le cœur, sinon, il sentira qu’il y a mensonge ou manque d’authenticité de votre part, et rien de constructif ne ressortira de vos discussions, bien au contraire.
Pour arriver à cette honnêteté avec vous-même, forcez-vous à prendre du temps pour vous. Faites des pauses, et offrez les moyens de respirer, de souffler ! Il appartient à chaque parent, dans son individualité, de se connaître, de savoir ce qui lui fait du bien, le ressource et l’apaise. Quand vous êtes sur(e) de ce que vous voulez, de ce dont vous avez besoin, octroyez-vous les moments nécessaires à l’assouvissement de vos besoins. Selon les cas, cela pourra être une pause lecture avec un thé bien chaud, une balade en forêt, 3 jours off, une manucure, un spa, etc, etc. Vous en avez le droit, pour ne pas dire le devoir ! car, un parent frustré fera immanquablement rejaillir ses émotions négatives sur ceux qu’il côtoie au quotidien, et qu’il est le plus facile d’accabler – ses enfants. Autorisez-vous à ne pas être parfait(e), personne ne l’est ! en tant que parent IEF, considérez-vous comme un accompagnant qui est aussi là pour apprendre, vous êtes un guide, pas un supérieur, pour l’enfant. Vous ne pouvez pas tout savoir, eux non plus ! personne ne peut tout savoir ! vous ne pouvez pas tout faire en même temps, et eux non plus ! personne ne peut tout faire en même temps !
Prenez soin de vous, prenez du temps pour vous, vous n’en serez que plus disponible pour vos enfants. Vous aurez plus d’énergie pour eux, plus de patience aussi. Et, parce que vous aurez pris soin de vous, vous ne serez plus étouffé(e) par des frustrations diverses. Apaisé(e), vous serez bien plus disposé(e) à faire preuve d’affection et de douceur – deux atouts qui sont, en réalité, les éléments clés de la réussite d’une IEF.
Cessez de vous mettre la pression ! un enfant est naturellement curieux, et ouvert aux apprentissages. Si vous n’avez pas envie un jour, ce n’est pas un problème ! ouvrez ensemble un bon bouquin (cela aura en plus l’avantage de resserrer les liens qui vous unissent), ou bien sortez faire une bonne balade ! (cela aura en plus l’avantage de resserrer vos liens avec la Nature, dont les bénéfices sur la santé physique et mentale de chacun ne sont plus à prouver).
En tant que parent instructeur, qui a fait un choix, vous faites certainement du mieux que vous pouvez, alors, soyez fière de vous ! ce seul sentiment suffira à rebooster les troupes. Et, soyez fière aussi de votre vulnérabilité !
Tout cela est primordial, car le sentiment de compétence parentale influe sur la manière dont les parents accompagnent leur enfant., et donc sur son développement et son comportement.
Chacun a des hauts et de bas dans la vie, enfant comme parent (et oui), et les parents en IEF en dérogent pas à la règle. C’est pourquoi il est si important de lâcher prise, de ne pas hésiter à déclarer la journée « off », si au réveil, on en ressent le besoin. Ce n’est pas une journée prise de temps en temps qui affaiblira l’éducation de vos enfants, d’autant que les apprentissages se font aussi (surtout ?) en extérieur en IEF, et au quotidien !
L’IEF demande beaucoup d’énergie, de patience, de travail, de préparation. C’est du temps que l’on ne consacre pas à autre chose.
Il ne faut pas hésiter à se remettre en question, son mode de fonctionnement, ses principes, et se ré-organiser. Donner un nouveau souffle insuffle un nouvel élan.
Se sentir vulnérable, c’est se sentir petit, humble, faible, il faut reconnaître cela comme un besoin d ‘aide extérieure, et rebondir sur ce sentiment pour s’ouvrir et se tourner vers les autres. On en profite pour instaurer des rituels hebdomadaires ou mensuels, de rencontres qui font du bien à tout le monde. Après tout c’est vrai, élever des enfants n’est déjà pas chose simple, on y ajoute en plus le devoir d’instruction. C’est une décision très courageuse et très brave, il faut déjà être fier de ça !
N’hésitez pas à vous trouver un refuge, un endroit qui vous apaise, où vous savez que vous pouvez vous réfugier en cas de besoin. Fondez une tribu, qui vous soutiendra le moment venu, et que vous soutiendrez à votre tour dans les épreuves.
Anne-Catherine Proutière, fondatrice du blog « Pédagogies alternatives en liberté », pour Pass éducation